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Chemins de traverses

7 juillet 2016

Réflexions 7 - DANS L'OMBRE OU DANS LA LUMIERE ?

brulart Au cours d'une intervention devant la direction de mon entreprise, je me suis indigné que cette dernière utilise Twitter afin de communiquer avec ses clients comme avec son personnel. « En 140 signes, aucun débat n'est possible... On enfonce le lecteur dans la médiocrité du prêt à penser. »Il me fut répondu que l'aphorisme permettait, à l'instar de certains philosophes antiques, d'envoyer des messages non dénués d'une certaine profondeur.

Il me fallut bien admettre que ce n'était pas faux. Moi, le disciple de Diogène, pris à mon propre piège comme un vulgaire sophiste... Il y a de quoi enrager me direz vous. Il y a surtout un rappel flagrant de la réalité : Dans un débat public, la réalité n'a pas toujours l'importance que l'on voudrait, seul compte l'art de convaincre. Jacques Vergés en son temps avait bien expliqué tout cela : la justice est un jeu, le tribunal un théâtre, le procès est une scène sur laquelle la vérité qui apparaîtra sera celle de celui qui aura raconté l'histoire la plus belle. 

Ainsi, toutes nos relations aux autres ne seraient que « jeu de dupes ». Nous ne serions que les pantins d'une relativité permanente, jouant sans cesse du Pirandello : A chacun sa vérité. C'est effectivement ce qu'enseigne le monde dans lequel nous vivons, de Marc Alain Ouaknin qui enseigne qu'il n'y a qu'un seul Dieu, mais qu'il est différent pour chacun d'entre nous, d'où la multitude de nom enfermés dans le tétragramme YHVH, jusqu'au Palpatine de Star Wars qui affirme à son disciple : « Le bien, le mal...c'est juste une question de point de vue ».  

Mais alors, quel enseignement celui qui a reçu la mission protéger les plus faibles doit-il en tirer ? La raison du plus fort est toujours la meilleure ? A cette fable sans doute connue de tous les décideurs, je préfère celle du Lion et du moucheron qui affirme qu' »entre nos ennemis Les plus à craindre sont souvent les plus petits ». Relativité, encore et toujours...  

Cet enseignement, utile en temps de guerre, tous les lecteurs de Machiavel ou de Sun Tsu le connaisse. Je le connais aussi, et je sais m'en servir. Mais j'y répugne toujours dans la mesure où après les batailles, il ne reste que des morts et des ruines. Ce n'est pas ainsi que l'on participe utilement aux bonheur des hommes.

Qui que soit notre adversaire, quelles que soient ses raisons (et sans doute lui paraissent-elles toujours légitimes), je veux croire qu'un vrai dialogue entre les partis opposés, à défaut de faire surgir une vérité absolue qui n'existe nulle part, permet toujours d'éviter bien des souffrances inutiles et de mieux satisfaire ceux qui nous font l'honneur de nous demander de les représenter.  

C'est une entreprise difficile, dans la mesure où elle nécessite que tout le monde soit de bonne foi. Elle nécessite également que les négociateurs n'aient pas à se munir d'une longue cuillère en tremblant de souper avec « le Diable ». C'est également une démarche la plupart du temps méprisée par les partisans des deux camps, les uns ayant faim et soif de justice, les autres certains que leur « pragmatisme » est le seul chemin possible. Ce qui implique que les négociateurs soient des hommes de l'ombre, ou en tous cas ne recherchent pas la lumière des projecteurs.

Un exemple parmi tant d'autres possibles : qui aujourd'hui connaît le nom de Nicolas Brulart de Sillery ? Un inconnu qui négocia dans le plus grand secret la paix de Vervins entre la France, l'Espagne et la Savoie...en 1598. Il obtint également du Pape l'annulation du mariage entre Henri de Navarre et la reine Margot, permettant ainsi le remariage de Henri IV et Marie de Médicis. Sans lui, Louis XIII ne serait pas né, et l'Histoire de France aurait été totalement différente.  

Ces hommes de l'ombre, ces hommes de paix, apportent plus, j'en suis persuadé que ceux qui, connus du grand public, avance en parlant fort et en donnant des coups de mentons. Et c'est bien de ces hommes de l'ombre que j'entends encore et toujours m'inspirer pour un meilleur service rendu à ceux qui souffrent, ceux qui luttent, ceux qui sont incapables de se défendre eux mêmes, mais qui souvent font la richesse d'un pays entier.  

La paix ne se construit pas sur les voies royales, mais sur les chemins de traverses qu'il faut oser emprunter. Pour le coup, je me suis résigné à ouvrir un compte sur Twitter...

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3 juillet 2016

DEMOCRITE ET LUCRECE, A DECOUVRIR ENFIN....

Lucrèce

Parmi les philosophes présocratiques dont les thèses sont restées inconnues pendant longtemps, on trouve Démocrite. Ce dernier considérait la matière comme constituée d'atomes indivisibles et éternels. Le vide existe, c'est ce qui permet le mouvement des atomes. Les figures que forme la matière se distinguent par leur taille, leur poids et leur vitesse. Les corps complexes sont formés de corps plus simples qui se désagrègent après la mort. L'âme est, quant à elle, composée d'atomes particuliers, subtils, légers et chauds. La perception de la matière est provoquée par l'émission de substances très fines qui interagissent avec les sens de l'homme. 

Cette première vision cohérente du monde a inspiré Epicure et Lucrèce. La conséquence de cette théorie est le principe de causalité et un déterminisme total, permettant de concevoir le monde réel (matériel) sans création, ni référence à Dieu ou au surnaturel. Les dieux ne sont que la représentation de l'idée que les hommes s'en font, des rêves en quelque sorte. Le matérialisme théorique de Démocrite n'empêche pas une forme d'idéalisme morale. En matière de morale, le déterminisme conduit à rechercher le calme de l'âme, vidée de toute crainte et de toute superstition. Il est en cela un précurseur d'Epicure. 

 

Lucrèce est également un disciple d'Epicure. Il aurait été l’élève de Zénon, en Grèce, mais il s’est surtout montré un disciple enthousiaste d’Epicure, deux siècles après la mort de ce dernier. Selon la tradition chrétienne (Saint Jérôme) controversée, visant à discréditer ce poète jugé impie, il se serait suicidé après avoir été rendu à moitié fou par un philtre amoureux. Son unique poème, De Natura Rerum, aurait été écrit dans les périodes de répit de son délire. Il est un appel vibrant à la libération de l'homme.
Lucrèce essaie de faire connaître l’épicurisme aux romains dans la période troublée de la fin de la République. Il voit la connaissance matérialiste de l’univers comme un moyen d’atteindre l’ataraxie (absence de trouble de l’âme), finalité de l’épicurisme. Il reprend et développe la théorie du clinamen d’Epicure (déviation spontanée du mouvement des atomes dans leur trajectoire), forme de liberté mécanique, conduisant à la liberté humaine. 
Pour Lucrèce, qui n'était pas athée au sens strict, les dieux existent bien mais ils sont étrangers à la création de notre monde et n'y interviennent pas. Il est donc inutile de les prier et absurde de les craindre. Quant à la Providence et aux superstitions, elles ne sont que des inventions de l'ignorance et de la peur.

http://atheisme.free.fr/Biographies/Lucrece.htm

"Quant aux dieux, hors du monde et des choses humaines,
La loi de leur nature isole leurs domaines
Dans la suprême paix de l'immortalité.
Tout péril est absent de leur félicité.
Satisfaits de leurs biens, ils n'en cherchent pas d'autres,
Et, libres de tous maux, ils ignorent les nôtres.
Ni vice, ni vertu, ni pitié, ni courroux
N'ont de prise sur eux; ils sont trop loin de nous."

(Lucrèce / env. 98-55 avant JC / De Rerum Natura, Livre 1)

16 juin 2016

Réflexions 6 - REFORME OU REVOLUTION

ErasmeELe débat concernant le libre arbitre opposa en son temps le moine Luther et l'humaniste Erasme de Rotterdam. Débat vif, houleux et passionnant mais dont la plupart des arguments sont aujourd'hui dépassés. Ce n'est donc pas le libre arbitre qui m'amène à parler d'eux dans cet article, mais plutôt de la différence qui existe entre un révolutionnaire et un réformiste.

Les deux souhaitent changer la société. Le premier cependant souhaite que ce changement soit total, et considère qu'il ne peut avoir avoir lieu qu'en détruisant totalement la société existante. Le second considère qu'une telle attitude engendrerait des violences qui deviendraient vite incontrôlables, et souhaite opérer par petites touches, dans le stricte cadre de la légalité. 

Au XVIième siècle, Luther, comme Erasme considèrent que l'Eglise est corrompue, que ses ministres sont indignes, et que le Pape est bien loin des préoccupation évangéliques qui devraient être les siennes. Luther choisit l'affrontement... Il considère qu'il n'y a rien à attendre de la part de gens malhonnêtes et qu'il est temps de renverser la table. L'affichage publique de ses 95 thèses contre les indulgences est une véritable déclaration de guerre à la papauté dans la mesure où elle entend dissuader le petit peuple de payer pour s'assurer une place au Paradis. Or, Rome a besoin de cet argent afin de financer la construction de la basilique St Pierre.

Erasme est sans doute d'accord sur ce point avec Luther, mais il ne le dira pas ainsi. Il préfère écrire et se moquer gentiment des ministres incapables ou prévaricateurs. Proposer des réformes censées renforcer à terme, la foi des croyants et l'influence de l'Eglise qu'il souhaite voir redevenir vertueuse. Il voit, il comprend rapidement les désastres humains que risque d'engendrer un affrontement avec l'Eglise de Rome. Il veut à tout pris éviter un schisme... 

Qui a raison ? 

Sur le plan moral, c'est Luther. La corruption existe, et elle est telle que des réformettes ne permettront pas de lutter contre elle. Les indulgences sont indéfendables d'un point de vue théologique. Et le tremblement de terre qui aura bientôt lieu à cause du moine forcera l'Eglise à engager une contre réforme qui lui rendra un peu de dignité. Erasme lui-même qui s'opposait à la violence sera désavoué finalement par cette église qui ne supportera pas longtemps ses leçons de vertu. 

Mais sur le plan pratique, ou humain, c'est bien Erasme qui est dans le vrai. Parce que le schisme aura finalement lieu. Et qu'il entraînera d'abord une guerre des paysans menée par des plus extrémistes que Luther, puis la naissance du protestantisme et avec lui des années de guerre de religions qui feront des millions de morts à travers l'Europe. Luther pour finir, sera trahi par ses successeurs, et Calvin se comportera avec lui comme St Paul avec le Christ, fondant une église dont les règles seront sans doute plus dures encore que celle de l'Eglise qui effrayait Luther. 

Comparaison n'est pas raison, certes. Mais c'est un peu le drame que nous vivons aujourd'hui à propos du débat concernant la loi travail. Une mauvaise loi pour les salariés que les syndicats « révolutionnaires » ont bien raison de dénoncer et de combattre. Mais face à un gouvernement intransigeant, ils ne peuvent entraîner le pays que dans une forme de radicalisation qui risque d'échapper à tout le monde.

En face, les syndicats réformistes prétendent pouvoir éviter le pire en acceptant une partie de la loi et en obtenant quelques modifications. Mais cela équivaut qu'on le veuille ou non à accepter une forme d'injustice intolérable, et à précariser encore un peu plus les salariés de notre pays. 

D'un côté le camp de la justice à tout prix, de l'autre celui du pragmatisme et de la négociation.

Luther dirait qu'on ne négocie pas avec le Diable.

Erasme répondrait que le Paradis étant pour l'instant inaccessible, mieux vaut s'assurer le purgatoire et tenter d'éviter l'enfer.

Et vous, qu'en pensez vous ? 

Quoiqu'il en soit, l'Histoire des hommes et celle des idées me semblent également un chemin de traverse intéressant pour philosopher.

16 juin 2016

Réflexions 5 - LIBRES...COMME DES PIONS SUR UN ECHIQUIER

 

omar La question du libre arbitre pose nécessairement celle de l'existence de Dieu. Mais lequel ? Le Dieu chrétien qui nous aurait créé libre, par amour (mais qui n'hésitera pas à nous punir si notre existence n'est pas conforme à ses commandements), ou le Dieu de l'Islam qui nous veut totalement soumis à sa Loi, bien que pouvant lui désobéir et par conséquent préférer l'Enfer au Paradis. Si l'on y réfléchit bien, cela n'a aucun sens. La liberté ne serait dans ce cas qu'une tentation... Or, les théologies chrétiennes comme musulmanes affirment que Dieu veut notre bien, et qu'il ne saurait nous tenter ainsi. Le tentateur, c'est le Diable... Donc, si Dieu veut notre bien, et qu'il nous a fait libre, cette liberté ne saurait en aucun cas nous conduire à l'Enfer. Mais si nous sommes libre, alors Dieu n'est plus tout puissant, puisque dans ce cas, il n'a plus d'influence sur nous. 

Les religions monothéistes ont donc inventé le concept d'un libre arbitre qui n'en est pas un, puisque si nous nous écartons de leurs doctrines, nous sommes condamnés à la géhenne éternelle. Ce qui fait hurler Nietzsche d'indignation :   « Le christianisme est une métaphysique de bourreau », le libre arbitre serait « le plus suspect des tours de passe-passe des théologiens, aux fins de rendre l'humanité « responsable », au sens où ils l'entendent, c'est-à-dire de la rendre plus dépendante des théologiens » (Crépuscule des idoles). 

Déterminisme, donc. Nous serions malgré nous des marionnettes agissant en fonction de notre nature propre, de notre éducation, de notre milieu social, et des événements qui se présentent à nous, sans autre choix que celui d'accepter ce qui nous arrive. Et Nietzsche, toujours nous propose d'aimer cette acceptation (Amor Fati). Oui, mais alors... Si notre propre nature, ou notre éducation, nous amène justement à ne pas aimer cette acceptation ? Quelle part de choix nous reste-t-il ? La vie n'est-elle pas une sinistre absurdité ? Voudrait-on sortir de ce cercle infernal en mettant fin à nos jours que cela serait impossible sans avoir été doté d'une nature propre capable de se suicider. 

Faut-il en croire le poète, mathématicien, et philosophe Omar Khayyâm qui écrivait : 

Le Ciel est le joueur, et nous, rien que des pions.

C'est la réalité, non un effet de style.

Sur l'échiquier du monde Il nous place et déplace

Puis nous lâche soudain dans le puits du néant.  

 

Quoiqu'il en soit, libre arbitre ou pas, nous sommes visiblement soumis à des forces qui nous dépassent, quelque soit le nom que nous souhaitons leur donner, Dieu, Destin, Cosmos, Nature, etc.

Mais le débat est important dans la mesure ou dans l'optique du libre arbitre, nous sommes responsables de nos actions, et coupables de nos erreurs, donc condamnable. Dans celui du déterminisme, nous ne sommes ni responsables, ni coupables de rien du tout. Condamner alors un homme pour ses actes serait alors une injustice. Voilà qui interpelle... 

En attendant, pourquoi ne pas suivre les conseils d'Omar, et chercher nos vérités dans la poésie qui après tout (mais nous y reviendrons) est un chemin de traverse des plus agréable. 

J'entends dire que les amants du vin seront damnés.

Il n'y a pas de vérités, mais il y a des mensonges évidents.

Si les amants du vin et de l'amour vont en Enfer,

alors, le Paradis est nécessairement vide.

 

 

16 juin 2016

Réflexions 4 - LA COLERE DES DIEUX

 

 

IroquoisComprendre la vie... 

On pouvait lire dans leurs yeux toutes la détresse du monde. Il avait suffit de quelques jours de pluies pour que les eaux montent et envahissent les routes, les villages, les villes, les maisons. Des animaux étaient morts noyés dans les fermes, des foyers avaient été détruits, des commerçants avaient tout perdu. Certains habitants s'étaient pour finir retrouvés piégés et était morts noyés... Comprendre ? Mais comprendre quoi ? Ils n'habitaient pourtant pas dans des zones inondables, à priori. 

Sauf que... 

Sauf que ceux qui avaient classifiés les zones s'étaient trompés. Sauf qu'à force de bétonner partout, toujours plus, pour construire des parkings de supermarchés, des logements, à force de détruire des forêts, on avait oublié une chose essentielle : si nous refusons de vivre en harmonie avec la nature, la nature reprendra toujours ce que nous tenterons de lui voler. 

On peut avoir de la compassion pour les victimes de ce qu'on appelle (à tort) une catastrophe naturelle. Mais cette compassion ne sert à rien si nous ne tirons pas les leçons des événements qui nous arrivent.

On peut également se tourner vers l'écologie. Etudier la nature est une bonne chose. Mais cela ne sert à rien non plus si nous refusons de tenir compte des résultats de ces études.

Depuis des siècles, l'homme pense qu'il pourra toujours soumettre les éléments à ses caprices. Jusqu'aux inondations (prévisibles), aux tremblements de terre (prévisibles), aux tsunamis (prévisibles), qui lui rappellent la triste réalité. 

Un chemin de traverse pour vivre en harmonie avec cette nature qui peut pourtant tellement nous apporter. Nous irons cette fois le dénicher dans une civilisation détruite par l'occident platonicien.

 

Prière iroquoise

 

Nous rendons grâces à notre mère, la terre, qui nous soutient. Nous rendons grâces aux rivières et aux ruisseaux qui nous donnent l'eau. Nous rendons grâces à toutes les plantes qui nous donnent les remèdes contre nos maladies. Nous rendons grâces au maïs et à ses sœurs les fèves et les courges, qui nous donnent la vie. Nous rendons grâces aux haies et aux arbres qui nous donnent leurs fruits. Nous rendons grâces au vent qui remue l'air et chasse les maladies. Nous rendons grâces à la lune et aux étoiles qui nous ont donné leur clarté après le départ du soleil. Nous rendons grâces à notre grand-père Hé-No, pour avoir protégé ses petits enfants des sorcières et des reptiles, et nous avoir donné sa pluie. Nous rendons grâces au soleil qui a regardé la terre d'un œil bienfaisant. Enfin, nous rendons grâces au Grand Esprit en qui s'incarne toute bonté et qui mène toutes choses pour le bien de ses enfants. 

 « Nos mœurs sont différentes des vôtres. La rue de vos villes fait mal aux yeux de l'homme rouge. Mais peut-être est-ce parce que l'homme rouge est un sauvage et ne comprend pas. 

Il n'y a pas d'endroit paisible dans les villes de l'homme blanc. Pas d'endroit pour entendre les feuilles se dérouler au printemps ou le froissement d'aile d'un insecte. Mais peut-être est-ce parce que je suis un sauvage et ne comprends pas. 

Le vacarme semble seulement insulter les oreilles. Quel intérêt y a-t-il à vivre si l'homme ne peut entendre le cri solitaire de l'engoulevent ou les palabres des grenouilles autour d'un étang la nuit ? Je suis un homme rouge et je ne comprends pas.  

L'Indien préfère le son doux du vent s'élançant comme une flèche à la surface d'un étang, et l'odeur du vent lui-même, lavé par la pluie de midi, ou parfumé par le pin pignon. L'air est précieux à l'homme rouge car toutes choses partagent le même souffle : la bête, l'arbre, l'homme, tous partagent le même souffle. » 

 

 

 

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15 juin 2016

Réflexions 3 - QUAND LES FEMMES SORTENT DE LA CUISINE...

hipparchiaDerrière les mots, les grands discours, les belles déclarations d'intentions, derrière même les lois, se cachent toujours une réalité bien différente. Toujours le monde de Platon qui avait mis en place une école pour le plus grand nombre dans lequel il dispensait une partie de son enseignement, et une autre réservée à l'élite réservée à ceux qu'il jugeait digne de connaître la Vérité. En résumé, des facs sans le sous pour les uns, de grandes écoles pour nos futurs dirigeants...

Il en va de même dans notre société où plus personne ne comprendrait que les femmes (la moitié de l'Humanité), ne soient pas sur le papier l'égale des hommes. Mais, on le constate chaque jour, la véritable égalité n'existe toujours pas. Mais au fait, y a-t-il eu des femmes philosophes ? 

Oui. Et elle furent nombreuses depuis l'antiquité. Leurs noms ? Thémista, Léontion, Plotina Augusta (épicuriennes). Hipparchia (Cynique) Thargélia, Aspasie (sophistes), Thémistocléia, Bitalé, Tymicha (Pythagoriciennes). Et la liste est longue... Or personne ne les connaît, leurs biographies restent à écrire, et il semblerait que cela ne soit pas pour demain tant la chose n'intéresse personne. Pourquoi ce silence, pourquoi ce mépris ?

Aristote (élève de Platon) considère que la femme est « par nature » inférieure à l'homme. Proche de l'animal, destinée à être gouvernée par le sexe fort. Platon nous explique qu'elle accouche des corps, mais que c'est Socrate qui accouche les âmes. Socrate (toujours selon Platon), demandera avant de mourir que les femmes quittent la pièce afin de rester entre gens sérieux... Quant à Diotime, il enseignera que le seul amour qui puisse mener au « bien » est celui que l'on pratique...entre hommes.

Un peu plus tard, St Paul s'empressera également de trahir le message de Jésus concernant les femmes pour décréter que ces dernières avaient pour rôle d'être de bonnes épouses, de se voiler la face et d'être soumises à leurs maris. Femmes, quantité négligeable également selon St Augustin qui abandonnera la sienne afin de devenir évêque...

Et cela continuera au fil des siècles... C'est que la femme renvoie l'homme à sa principale faiblesse : le désir, le besoin de faire l'amour. Désir considéré comme animal chez ceux qui, mettant leurs pas dans les traces de Platon, considèrent que l'âme nous élève, et que le corps nous ramène à la bestialité. Ainsi verra-t-on Kant et Pascal affirmer leur mépris pour les passions charnelles, et Rousseau affirmer que l'homme doit être éleve pour la guerre et la femme pour le délassement du guerrier. Il faut préciser que Rousseau aimait à se souvenir avec émotions des fessées qui lui donnait sa gouvernante... La peur d'assumer ses pulsions, encore et toujours, comme moteur de la misogynie. 

On nous répondra qu'aujourd'hui les choses ont bien changé, que les femmes peuvent s'exprimer librement, que le sexisme est condamné. A voir... Le harcèlement sexuel, les propos salaces, sont encore partout le quotidien des femmes qui voudraient prendre la place qui leur revient dans notre société. Et les scandales ont lieu partout, y compris à l'Assemblée Nationale. Le monde, finalement n'a pas vraiment changé, du moins pas dans les esprits.

Lire les femmes philosophes, de Hannah Arendt à Simone de Beauvoir en n'oubliant pas de se renseigner sur les premières philosophes de l'antiquité. Un nouveau chemin de traverse pour rendre à la moitié de l'humanité la place qui est la sienne...

15 juin 2016

Réflexions 2 - LES TWEETOS DE DIOGENE

diogène Il existe une incroyable quantité de doctrines philosophiques dont la plupart se contredisent entre-elles. D'où l'étonnement, et parfois la détresse des étudiants en philosophie qui, espérant trouver dans cette matière La Vérité, se retrouvent confrontés à plus de questions que de réponses. D'autant plus que bien souvent, il y a tout un monde entre la doctrine enseignée et la vie réelle menée par le philosophe qui la défend. Ainsi Rousseau écrit-il un traité sur l'éducation des enfants après...avoir abandonné les siens. Ainsi Voltaire défend-il par écrit la tolérance et la liberté d'expression, tout en réclamant au Roi des lettres de cachet afin de faire enfermer ses contradicteurs. Que penser de l'humanisme de Sartre lorsqu'il affirme à propos d'Arthur Koestler qu'un non communiste est moins qu'un chien ? Les exemples sont innombrables et peuvent rebuter... Après tout, à quoi sert-il d'écrire de beaux et grands discours humanistes si c'est pour se comporter comme le pire des salauds ? 

Diogène, lui, n'a rien écrit. Pas de doctrine, pas de discours humaniste, pas de bréviaire... Il a vécu en philosophe, et a enseigné par l'exemple. Le mépris des richesses ? Il vivait comme un vagabond et logeait dans une amphore. Le mépris des convenances ? Il se masturbait en public. Quant à ses propos, ils nous sont racontés par les témoins de l'époque. Pas de discours pompeux... Des phrases courtes, des aphorismes, et surtout des actes...

Surnommé le chien à cause de sa manière de vivre, il eut un jour à faire à des convives éméchés qui lui jetèrent des os provenant de leur repas. Diogène se planta alors au milieu d'eux et leur pissa dessus en levant la patte...comme le chien qu'on prétendait qu'il était. 

Diogène le chien donc, ou Diogène le cynique aurait pu aujourd'hui dispenser son enseignement sur tweeter tant il avait l'art de condenser sa pensée en des phrases fortes et de clouer en même temps le bec de ses contradicteurs. 

A Platon qui tente de se moquer de lui en disant : « Si tu avais cultivé le Tyran Denys, tu ne serais pas obligé de laver des laitues » il rétorque : « Si tu avais lavé des laitues, tu n'aurais pas eu à cultiver un tyran... » 

A Alexandre le Grand qui lui disait : « Demande moi ce que tu veux, je te le donnerai ! » Il répondit « Ôte toi de mon soleil ! » 

A un philosophe qui avait été frappé par un de ses étudiants, il expliqua : « Enseigner la sagesse, c'est faire la guerre aux sots, alors mets un casque lorsque tu enseignes ! » (Conseil on ne peut plus d'actualité pour tous les enseignants d'aujourd'hui). 

Simplicité, courage, liberté de penser, liberté sociale, refus des compromis, Diogène est l'exemple même de la vie philosophique telle qu'elle peut-être vécue. Il est également le premier à avoir déclaré à un citoyen qui lui demandait qu'elle était sa patrie : « Je suis citoyen du monde ».

Pour lui, les dieux ne servent à rien, la propriété est une chaîne, l'amour ne peut se concevoir que dans une totale liberté... Bref, ce « présocratique » qui cracha au visage de Socrate qui prétendait ne voir que de la vanité dans les trous de son manteau, était également un adversaire résolu de Platon et de son enseignement. 

Diogène donc, comme guide d'un de ces chemins de traverses qui mènent à la vraie liberté. A condition de ne pas avoir peur de marcher pieds nus et de ne pas manger tous les jours à sa faim.

 

14 juin 2016

Réflexions 1. PLATON EST UN VIEUX CON

platon

A quoi sert la philosophie ? Voilà une question qui paraîtra bien étrange aux initiés, mais qui pourrait changer la vie de ceux qui ne le sont pas. 

Nous vivons aujourd'hui dans un monde où les sciences humaines sont négligées, où seules comptent la productivité, et la rentabilité. On ne fait plus rien pour rien. « Qu'est-ce que ça me rapporte de...(au choix) discuter avec mon voisin, d'avoir le sens de la justice, d'être aimable, de connaître l'Histoire de mon pays ou des civilisations, etc. » Ce n'est pas ça qui paiera mon loyer, qui me donnera du travail, qui me permettra de m'élever socialement.. Alors la philosophie... Spéculer sur des idées, se taper des livres illisibles écrits par des gens employant un vocabulaire compliqué, des phrases alambiquées, tenant des propos incompréhensibles. Une purge ! Très peu pour moi... Au fait, qu'y a-t-il ce soir sur TF1 ? Et puis, s'il faut être sincère, tout cela n'est pas totalement faux... La philosophie, telle qu'elle est enseignée dans les universités ne sert à rien d'autre qu'à...devenir enseignant en philosophie. Ce n'est pas rien, mais dans le monde d'aujourd'hui, cela est effectivement devenu inutile. Les initiés parlent aux initiés, se réunissent entre initiés, font des blagues d'initiés et s'esclaffent entre initiés... Et puis après ? 

Et puis après il reste l'essentiel. L'essentiel qu'on ne peut découvrir qu'en prenant des chemins de traverses, en fouillant dans les anecdotes, dans les arrières cuisines, en scrutant avec gourmandise les petites histoires qui font l'Histoire. Et alors tout s'éclaire... Tout devient simple. Et notre vie peut s'éclairer, enfin. 

L'objet des textes qui vont suivre n'est pas de faire du lecteur un philosophe accompli. Il est de provoquer un questionnement, de susciter la curiosité, tout en provoquant du plaisir. Pas d'exégèse sur les textes fondamentaux, pas de jugements définitifs sur untel ou untel, mais des propositions de pistes à suivre, des réflexions fondées sur l'expérience, des théories mises en images.

Et puis surtout, toucher à tout. Parce que l'enseignement de la philosophie hélas, ne concerne la plupart du temps que les philosophies occidentales. Or, il y a et il y a eu des philosophes sur tous les continents. Lao Tseu, Confucius, Bouddha, ne sont pas enseignés dans nos universités... Et pourtant, Epicure, Sénèque, et Bouddha ont bien des choses en commun, Les sages de la Thora n'ont rien à envier à Saint Augustin... Alors nous allons piocher chez les uns et chez les autres, et picorer quelques idées utiles dans notre vie quotidienne. 

A quoi ça sert la philosophie ? A mieux comprendre le monde d'aujourd'hui... Sceptiques ? Vous allez voir. 

Parler de philosophie sans parler de Platon n'aurait pas de sens. Platon est quasiment celui qui a inventé le monde dans lequel nous vivons. Mais tout d'abord, pourquoi commencer par Platon et non par Socrate ? La plupart des spécialistes ne font-ils pas démarrer vraiment la philosophie occidentale avec lui, classant ses prédécesseurs dans l'obscurité de l'Histoire qu'ils définissent comme « présocratique », comme nous parlons couramment de la « préhistoire » en considérant qu'avant les égyptiens ou les gaulois, il ne s'est pas passé grand chose ?

Tout simplement parce qu'en réalité nous ne savons RIEN du Socrate historique. Ce dernier n'a rien écrit, n'a rien laissé, et son histoire ne nous est contée que par Platon (et Xénophon) dont le soucis de la véracité historique n'était pas la principale inquiétude. Socrate donc, est devenu un personnage de légende qui a permis à son disciple de faire passer ce qui en réalité était SES propres idées. 

Or que nous raconte l'Apologie de Socrate ? Que ce dernier sera injustement jugé et condamné à mort par le petit peuple de la cité qui comme tous les petits peuples dont parlera Platon était aveugle et ignorant.

Cette imbécillité du peuple est une idée récurrente chez Platon qui nous propose comme modèle politique une société dirigée par une élite (les philosophes à son époque, mais qui peuvent être remplacés par les énarques aujourd'hui) à laquelle est soumise le reste de la population chargée de s'occuper des tâches ingrates et abrutissantes. Entre les deux, l'armée et la police sont chargées de faire respecter l'ordre public (entendre : que chacun reste à la place qui est la sienne).

A ce modèle de société, Platon donne le beau nom de République... République, mais pas démocratie. La démocratie selon lui, engendrant fatalement le désordre et la dictature à cause de la bêtise (toujours) du petit peuple. 

Comparaison n'est pas raison dit-on souvent. Et pourtant... Nous vivons bien aujourd'hui dans une république dirigée par une élite qui accumulent richesses et avantages tandis que le petit peuple est sommé de travailler plus afin de survivre comme il peut.

Une république qui souffre d'un déficit démocratique, et dont le peuple a fait d'un parti autoritaire le premier parti ouvrier de France. Et dans laquelle par conséquent, on prétend de plus en plus passer outre les avis de la population, et même du parlement pour promulguer des réformes à coup de 49.3. 

Nous sommes donc bien dans le monde de Platon... Qui reste pour l’intelligentsia une référence incontournable.

Vous voyez, c'est assez simple la philosophie... Et cela rend le monde plus compréhensible. Désolant ? Pas forcément...  Il y a temps de chemins de traverses à explorer.

 

 

 

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